La bibliothèque « Clouds » : la modularité dans le rangement.

Cloud | C5/1 conçu par Erwan & Ronan Bouroullec et fabriqué par Cappellini, 2004, © architonic.com, (12.52 x 10.87cm)

Dans cet article nous allons parler de cette bibliothèque double face fabriquée en polyéthylène (fibre de verre) et disponible en blanc, rouge, vert clair ou encore vert foncé, qui fut lancée en 2004 par Cappellini.  Au départ on a un premier module composé de huit ronds ouverts, permettant le rangement. Mais l’avantage de cette bibliothèque est qu’en étant rotative, elle devient modulable à l’infini car elle nous offre la possibilité d’être combinée aux mêmes modules à l’aide de clips blancs (chaque élément est fournit avec deux clips). On peut donc choisir à l’envie la taille de la bibliothèque qu’on souhaite crée selon le nombre de rangements qu’il nous faut. Elle est sur pied et peut être disposé soit à la verticale soit à l’horizontale pour rappeler l’idée de nuage, cher aux frères Bouroullec. L’innovation de ce meuble réside aussi dans le fait que l’on peut rajouter des éclairages lumineux dans chaque alcôve. Chaque module n’est pas si grand (105cm de hauteur pour une largueur de 187,5cm et une profondeur de 40cm) et c’est pour cela qu’ils sont souvent combinés. Elle coûte en moyenne de 750 à 1000 euros.

Cette bibliothèque à la fois contemporaine et épurée nous offre une fois encore un exemple de modularité réussit par les frères Bouroullec.

Une bibliothèque « clouds » dans un intérieur contemporain, ©ambientedirect.com, (16.97 x 9.88cm)

Image hébergée par servimg.com

Exemple d’assemblement de bibliothèques « Clouds », 2004, © deco-design.fr, ( ).

 

 

 

 

Combinaisons multiples

Nous l’avons vu avec « Les algues » (2004), le principe de combinaisons multiples à partir d’un ou plusieurs modules types est assez présent dans le travail des frères Bouroullec. En effet, les « Algues » sont composées d’un seul prototype produit en série et qui peut être assemblés avec ses semblables. Dans la même lignée, semblent s’inscrire les « Vases combinatoires » (1998) ainsi que le « Zip Carpet » (2001).

Les « Vases combinatoires » sont l’un des premiers projets des frères Bouroullec, développés pour la maison Cappellini en 1998. Ces vases se composent de huit pièces en polyuréthane que l’on peut associer les unes aux autres. C’est à dire que chaque pièce peut être emboitée dans une autre grâce à des emplacements prévus à cet effet. On trouve six récipients et deux plateformes; l’une comportant trois socles et l’autre n’en comportant qu’un seul. Les différents modules sont conçus dans un design absolument épuré et minimaliste. Les formes de ces vases sont souples, douces, présentant de légères courbures harmonieuses. Leur couleur – ou plutôt leur manque de couleur – blanche renforce cette impression de pureté, d’objets immaculés.

Bouroullec R. et Er., "Vases combinatoires", 1997, polyuréthane, dim. variables, huit pièces,  © Morgane Le Gall - Bouroullec.com, (158,75x104,24 mm.).

Bouroullec R. et Er., « Vases combinatoires », 1997, polyuréthane, dim. variables, huit pièces, © Morgane Le Gall – Bouroullec.com, (158,75×104,24 mm.).

Ces « Vases combinatoires » semblent n’aller qu’à l’essentiel, s’étendant dans un esprit de suppression de toute ornementation superflue. Pourtant, ce manque d’éléments décoratifs n’enlève en rien le côté profondément ingénieux de l’objet. En effet, plutôt que s’attarder sur l’absence d’ornementation, il faudrait s’intéresser aux possibilités qu’offrent ces vases. Car c’est justement cet élément précis, qui rend cette création si attrayante.

Bouroullec R. et Er., "Vases combinatoires", 1997, polyuréthane, dim. multiples,  © Morgane Le Gall - Bouroullec.com, (61,1x02,6 mm.)

Bouroullec R. et Er., « Vases combinatoires », 1997, polyuréthane, dim. multiples, © Morgane Le Gall – Bouroullec.com, (61,1×02,6 mm.)

Les huit modules dont sont conçus les vases peuvent être associés les uns aux autres, je l’ai déjà précisé. Cependant, ces associations peuvent approcher les deux milles possibilités alternatives. Les vases comportent un nombre impressionnant de combinaisons, pouvant évoluer au gré des envies de son propriétaire, mais toujours en gardant son caractère zen et harmonieux.

Bouroullec R. et Er., "Vases combinatoires", 1997, polyuréthane, dim. multiples,  © Morgane Le Gall - Bouroullec.com, (104,77x158,75 mm.).

Bouroullec R. et Er., « Vases combinatoires », 1997, polyuréthane, dim. multiples, © Morgane Le Gall – Bouroullec.com, (104,77×158,75 mm.).

Dans la même lignée s’inscrit le « Zip Carpet », également réalisé pour Vitra. Il s’agit simplement de bandes de feutre de laine mesurant 200×75 centimètres, tantôt oranges, marrons, vertes ou noires. Chaque bande est ou peut-être attachée à une autre grâce à des fermetures éclaires placées de part et d’autre du tissus. Ainsi, l’utilisateur peut réaliser de multiples combinaisons colorées, selon ses envies, à l’image des « Vases combinatoires ».

Bouroullec R. et Er., Appartement 50, "Zip Carpet", feutre de laine, fermeture éclaire, 200x75 cm.,  © Bouroullec - Bouroullec.com, (148,16x214,84 mm.).

Bouroullec R. et Er., Appartement 50, « Zip Carpet », feutre de laine, fermeture éclaire, 200×75 cm., © Bouroullec – Bouroullec.com, (148,16×214,84 mm.).

Ces « Zip Carpet » ont été utilisé en 2010 à la Cité Radieuse de Le Corbusier, à Marseille. Les frères Bouroullec ont du agrémenter l’une des Unités d’habitation, l’appartement Cinquante. Ainsi, accompagné de plusieurs autres de leurs créations, comme les « Clouds« , il vient orner le sol en bois de l’appartement, lui apportant une dimension ordonnée mais non moins colorée.

Présentation et détail des objets: ‹http://www.bouroullec.com/›.

« Bouroullec: La Cité Radieuse, Marseille« , bouroullec.com, En ligne, ‹http://www.bouroullec.com/upload/facsimile/erb_appartement50_2010.pdf›, consulté le 08/04/2014.

Tomic Hughes Dana, « Installation by Ronan & Erwan Bouroullec. Le Corbusier Appartment 50 in Marseille« , yellowtrace.com , En ligne, ‹http://www.yellowtrace.com.au/installation-by-ronan-and-erwan-bouroullec-le-corbusiers-apartment-50-in-marseille/, consulté le 08/04/2014.

Vignal Marion « Les frères Bouroullec en toute simplicité« , lexpress.fr, En ligne, ‹http://www.lexpress.fr/styles/design/les-freres-bouroullec-en-toute-simplicite_497203.html, consulté le 08/04/2014.

Le canapé Ploum – Ligne Roset

Er. et R. Bouroullec, Canapé Ploum, 2011, Tissu, mousse, structure en acier,  2450 x 1265 x 760 mm, © reflexdéco, 700 x 468.

Er. et R. Bouroullec, Canapé Ploum, 2011, Tissu, mousse, structure en acier, 2450 x 1265 x 760 mm, © reflexdéco, 700 x 468.

Ce canapé, un incontournable de la Ligne Roset, conçut en 2011 par les frères Bouroullec, pourrait bien être le symbole même du confort.

Toute sa conception a été réfléchie, pensée et étudiée de A à Z pour offrir un bien-être optimum. Ce canapé, qui existe en deux tailles: le plus petit 2020 x 1190 x 760 mm pour trois personnes, et le plus grand: 2450 x 1265 x 760 mm pour quatre, offre des courbes d’exception souvent comparées à un nuage, à une bouche ou à un fruit fabuleux.

Er. et R. Bouroullec, Canapé Ploum, 2011, Tissu, mousse, structure en acier, 2450 x 1265 x 760 mm, © Archiproducts.com.

Er. et R. Bouroullec, Canapé Ploum, 2011, Tissu, mousse, structure en acier, 2450 x 1265 x 760 mm, © Archiproducts.com.

Er. et R. Bouroullec, Canapé Ploum, 2011, 2020 x 1190 x 760 mm, © studio Bouroullec.

Er. et R. Bouroullec, Canapé Ploum, 2011, 2020 x 1190 x 760 mm, © studio Bouroullec

Son apparence ergonomique en fait un meuble à mis chemin entre objet de design et oeuvre d’art.

Son assise, présentant une angulation légèrement renfermée, est conçue pour permettre un échange entre les personnes qui l’occupent.

Sa forme est étudiée pour s’adapter à toutes les positions du corps, ce que l’on doit également à une extrême maîtrise des techniques.

 

Er. et R. Bouroullec, Canapé Ploum (détail), 2011, 2020 x 1190 x 760 mm, © designshopper.

Er. et R. Bouroullec, Canapé Ploum (détail), 2011, 2020 x 1190 x 760 mm, © designshopper.

Le confort du canapé Ploum réside dans la combinaison de matériaux de différentes densités scrupuleusement agencés pour offrir un bien-être maximum: un revêtement stretch et une mousse hyper-souple. Le tissu stretch et extensible (réalisé en tricot de ouate de polyester matelassé et capitonné) recouvrant l’ensemble, permet un touché sensible, conforme à leur volonté d’un confort absolu.

Grace à une incroyable maîtrise des techniques et des matériaux, le canapé Ploup offre à son utilisateur la possibilité de s’installer selon toutes les positions possibles. Il est étudié pour que le corps ait des points d’appui confortable dans n’importe quelle position (même sur les accoudoirs).

Disponible en plusieurs coloris (crème, rouge, différentes nuances de gris), son design est économ et fluide. Il rappelle un cocon, ou un nuage où l’on aimerait plonger.

Er. et R. Bouroullec, « Ploum 2011 », Bouroullec.com, En ligne, http://www.bouroullec.com/, consulté le 07/04/2014.

Adeline B, « Ploum – R&E Bouroullec », designshopper.over-blog.com, En ligne, http://designshopper.over-blog.com/article-ploum-r-e-bouroullec-104091920.html, consulté le 07/04/2014.

« Ploum », Ligneroset.fr, En ligne, http://www.ligneroset.fr/Collection/vivre/canapes/Ploum_1764.aspx, consulté le 07/04/2014.

Les  » North Tiles » pour partitionner l’espace

North Tiles, 2006, pour Kvadrat. Mousse thermocompressée, textile. Centre Pompidou Paris, Musée national d’art moderne – Centre de création industrielle, Paris, © Tahon & Bouroullec, (11,08 x 8,85cm)

Les « North Tiles » ont a l’origine été conçus en 2006 pour l’aménagement du showroom de Kvadrat, une société danoise de textile. Pour cette création Ronan et Erwan ont bénéficié d’une liberté totale de création et ce showroom n’en ai apparu que plus étonnant. Ici on utilise le textile et la mousse pour créer des cloisons suspendues, à la fois paravent et mur. Il s’agit d’une nouvelle façon de diviser l’espace car bien plus qu’une fonction décorative, ce système a aussi une visée acoustique car le tissu isole des sons. Les « North Tiles  » sont donc des parois ludiques,  qui mettent en avant de nouveaux potentiels d’utilisation des tissus. Chaque élément se compose ainsi d’un cœur de mousse revêtu de tissu. Le produit existe revêtu de Divina, Divina Melange, Steelcut et Tempo en plus de 100 coloris différents. Et il faut environ 14 éléments North Tiles pour former un mètre carré tout en sachant qu’un élément principal mesure 28,4 x 64,5 x 1,7 cm. Là encore il s’agit d’un système pouvant être utilisé par des architectes mais aussi par des particuliers car les éléments s’assemblent grâce à un système de pliage simple et souple qui permet d’obtenir des surfaces de tissu en fonction de ses propres souhaits et idées. C’est aussi là que réside plus que jamais la modularité toujours présente au cœur des concepts des frères Bouroullec.

Illustration de la flexibilité des « North Tiles », © crdecoration.com/blog, (9,56 x 7,16cm)

Comme un grand nombre des productions des frères Bouroullec, celle ci a immédiatement été fort apprécié et adopté. Son succès fut tel que récemment le concept des « North Tiles » est entré dans la collection de design du Museum of Modern Art de New York. On l’a introduit dans d’autres institutions muséales comme pour réaliser un pavillon intérieur au Musée d’Art Moderne de Luxembourg en 2006 et un an plus tard cette création a été choisi pour un projet au Centre Pompidou de Paris.

L’espace autosuffisant

J’aborderais dans cet article certaines oeuvres de Ronan et Erwan Bouroullec s’inscrivant dans un thème qu’il me parait intéressant d’évoquer: l’espace auto-suffisant. J’entend par là des conceptions qui se suffisent à elles-mêmes et sont à elles seules un espace à part entière, qui les séparent de l’extérieur tout en s’y intégrant. Je présenterais la « Cuisine désintégrée » (1997), le « Lit clos » (2000) et la série des « Alcove sofa » (2006).

Bouroullec R.et Er., Cuisine désintégrée, 1997, aluminium, bois, plastique, mousse peinte, 2200x700x900 mm., © Ronan et Erwan Bouroullec - Bouroullec.com, (158,75x97,63 mm.).

Bouroullec R.et Er., Cuisine désintégrée, 1997, aluminium, bois, plastique, mousse peinte, 2200x700x900 mm., © Ronan et Erwan Bouroullec – Bouroullec.com, (158,75×97,63 mm.).

La « Cuisine désintégrée », que nous avons pu voir dans cet article, est l’oeuvre qui a fait découvrir les frères Bouroullec. En 1997, Ronan sort de l’Ecole nationale des arts décoratifs de Paris et propose avec son frère, au Salon du meuble de la même année, la « Cuisine désintégrée ». Ce meuble nomade, détaché des contraintes d’un plan fixe, permet à Giulio Cappelini de les repérer.  Celui-ci, fondateur de l’entreprise de design « Cappelini », confie aux frères de Bouroullec plusieurs projets, dont le « Lit clos », « Spring Chair » ou bien les « Clouds ».

Bouroullec R. et Er., Lit clos, 2000, bois de bouleau peint, acier peint, aluminium, cotton, cabine: 2400x2000x14000 mm., base: 700 ou 1800 mm.,© Morgane Le Gall - Bouroullec.com, (202,4x211,67 mm.)

Bouroullec R. et Er., Lit clos, 2000, bois de bouleau peint, acier peint, aluminium, cotton, cabine: 2400x2000x14000 mm., base: 700 ou 1800 mm.,© Morgane Le Gall – Bouroullec.com, (202,4×211,67 mm.)

Le « Lit clos », justement, est à l’image de la « Cuisine désintégrée », un espace nomade. En effet, à mi-chemin entre le lit et la chambre, il associe ces deux fonctions. D’un côté, le lit peut-être placé dans une chambre matérialisée, une pièce où il ne servira que de lit. D’un autre côté, il peut être placé dans une pièce toute autre, comme un salon ou une salle principale, pour servir à la fois de lit et de chambre. Il assure un espace intime à l’utilisateur, tout en étant ouvert sur l’extérieur. Ainsi, le « Lit clos » n’est pas oppressant grâce à ses nombreuses ouvertures et ses parois fines. Pourtant, aussi fines soient-elles, les parois offrent un sentiment d’intimité suffisant pour se sentir bien. Ce lit existe en deux surélévations différentes, l’une de 70 centimètres, l’autre de 180. Il approche, d’une certaine manière, l’idée que l’on peut avoir d’une cabane urbaine, quittant son terrain vernaculaire, dans les arbres.

Bouroullec R. et Er., "Lit clos", 2000,  aluminium, bois, plastique, mousse peinte, 2200x700x900 mm.,  © Morgane Le Gall - Bouroullec.com, (124,08x158,75 mm.).

Bouroullec R. et Er., « Lit clos », 2000, aluminium, bois, plastique, mousse peinte, 2200x700x900 mm., © Morgane Le Gall – Bouroullec.com, (124,08×158,75 mm.).

Il s’agit ici de ce que l’on pourrait appelé une « micro-architecture » qui s’inscrit dans la même lignée que la « Cuisine désintégrée ». Le « Lit clos » est auto-suffisant, car il peut à lui seul créer tout un espace. Il est un espace à part entière à lui-même, confortable et intime, mais toujours profondément ouvert sur l’extérieur.  Le « Lit clos » n’a hélas été édité qu’en douze exemplaires, aujourd’hui conservés dans des musées et autres institutions. Il s’agit d’une des oeuvres qui a fait réaliser aux frères Bouroullec qu’ils pouvaient évoluer en dehors du marché, comme l’un des frères l’a déclaré dans une interview:

« Il nous a fait comprendre que l’on pouvait mener un travail de recherche efficace en dehors du marché. » (1)

Outre le « Lit clos » et la « Cuisine désintégrée », une autre de leur conception me paraît particulièrement adéquat au thème de l’espace autosuffisant. Il s’agit de la série des « Alcove Sofa » (2006). Ce sont des fauteuils, mis au point pour la société Vitra. Leur concept est relativement simple: ils veulent créer un espace dans un espace. C’est à dire que ces fauteuils peuvent être placés à l’intérieur d’une pièce et réussir à créer à l’intérieur de celle-ci un espace intime.

Bouroullec R. et Er., "Highcove Sofa Highback", 2007, acier peint, aluminium, mousse, tissus, microfibres, fibre de verre, (2 assises) 1640 x 840 x 1360 mm ou (3 assises) 2370 x 840 x 1360 mm,  © Paul Tahon and R & E Bouroullec - Bouroullec.com, (211,67x151,02 mm.).

Bouroullec R. et Er., « Highcove Sofa Highback », 2007, acier peint, aluminium, mousse, tissus, microfibres, fibre de verre, (2 assises) 1640 x 840 x 1360 mm ou (3 assises) 2370 x 840 x 1360 mm, © Paul Tahon and R & E Bouroullec – Bouroullec.com, (211,67×151,02 mm.).

Combinant la fonction de fauteuil et d’alcôve, ils en exploitent les différentes caractéristiques. De dos, le fauteuil peut-être pris pour une paroi isolant l’utilisateur du reste de la salle. Assise à l’intérieur, la personne entre dans un espace confortable et ergonomique, tranquille et reposant, se distinguant de l’extérieur. Ce fauteuil, crée un espace particulier par sa simple présence. Objet non-fixe, comme la « Cuisine désintégrée » ou le « Lit clos », il les rejoint dans leur dimension autonome. En effet, ces trois conceptions, plus que du mobilier et des objets utilitaires, sont de vrais créateurs d’espace. Ils permettent de créer un espace à l’intérieur d’un espace, d’élaborer une dimension intimiste mais toujours grandement ouverte sur le monde extérieur.

 

(1) Fèvre Anne-Marie, « Les frères Bouroullec: hédonistes Underground« , liberation.fr, En ligne,‹http://next.liberation.fr/design/2011/01/20/les-freres-bouroullec-hedonistes-underground_708764›, consulté le 06/02/2014.

Présentation et détail des objets: ‹http://www.bouroullec.com/›.

« Ronan et Erwan Bouroullec. Vivre et travailler« , Vitra.com, En ligne, http://www.vitra.com/fr-fr/magazine/details/ronan-and-erwan-bouroullec-lifework, consulté le 07/04/2014.

La cuisine désintégrée

Er. et R. Bouroullec, Cuisine désintégrée, 1998, aluminium, bois, mousse dure peinte et plastique, 2200 × 700 x 900 mm,  © Feintrenie.

Er. et R. Bouroullec, Cuisine désintégrée, 1998, aluminium, bois, mousse dure peinte et plastique, 2200 × 700 x 900 mm, © Feintrenie.

La Cuisine désintégrée, créée en 1998, est une oeuvre qui marque un tournant dans la carrière des deux designers.

C’est en effet en présentant leur concept au Salon du Meuble de 1997 que les deux artistes se sont faits remarquer par l’éditeur milanais Giulio Cappelini. De cette rencontre découle une longue collaboration et leur reconnaissance dans l’univers du design.

La Cuisine désintégrée se compose d’un évier, d’une table et d’éléments de rangement en plastique, et de quatre pieds en aluminium.

Elle présente une toute nouvelle vision de ce que nous pouvions connaitre en matière de cuisine aménagée. La cuisine, précédemment conçue comme un élément architectural, devient ici un meuble à part entière. Elle est conçue comme un élément autonome (il suffit juste de rajouter les éléments de cuisson et l’eau). Elle est totalement indépendante du mur, se concevant comme une table qui n’a pas besoin du support d’un mur.

De plus, l’innovation principale se tient en la mobilité de l’ouvrage. Cette cuisine est conçue de telle manière qu’elle peut être repliée, déplacée et transportée aisément.  

Le style épuré donné par sa simplicité (La cuisine est moulée en une seule fois, supportée par 4 pieds) accentue son impression de mobilité.

La couleur blanche qui pourrait paraître à première vue anodine, a une signification majeure pourtant: elle empêche l’attribution de tous codes abusifs comme des critères de richesses ou de jeunesses. Ainsi la Cuisine désintégrée peut toucher un public universel.

La Cuisine désintégrée se place ainsi comme un meuble possédant sa propre gestion de l’espace, n’étant pas soumise à une architecture ou même à une conception temporelle puisqu’elle est déplaçable.

« 5 créations des frères Bouroullec », deco.journaldesfemmes.com, En ligne, http://deco.journaldesfemmes.com/design/interview/0709-bouroullec/1.shtml, consulté le 24/03/2014.

Les « Algues » : conception modulaire par excellence

Si je devais choisir une oeuvre représentant le plus le travail des frères Bouroullec, leurs « Algues »,  sont celles qui apparaitraient en premières. En effet, elles sont certainement l’exemple le plus parlant de leur réflexions sur l’espace et sa modification au travers d’une infinité de combinaisons.

Elles sont créees en 2004 pour Vitra, une société suisse de fabrication de meubles designs, proposant des solutions pour améliorer la « qualité de l’habitat ». Ce produit n’est pas la première association des frères Bouroullec avec l’entreprise Vitra. C’est en 2002 que s’effectue le premier contact entre Ronan & Erwan Bouroullec et la société, au travers du directeur actuel de l’entreprise: Rolf Fehlbaum. Rolf Fehlbaum connaissait certaines des réalisations des frères Bouroullec, dont deux de leurs oeuvres les plus emblématiques: le « Lit clos » (2000) et la « Cuisine désintégrée » (1998), auxquels nous consacrerons bientôt un article. Celui-ci est le fils de Willi Fehlbaum, qui a fondé Vitra en 1950, société alors allemande, mais qui deviendra rapidement suisse, suite à un déplacement de siège social à Birsfelden. L’entreprise se concentre sur la production de meubles de designers, bien qu’elle ne restreigne pas son champs d’intérêt à ce seul domaine.

BOUROULLEC R. et Er., Algues, 2004, polyamide injecté, chaque unité: 300 x 40 x 270 mm., © eric & marie – Bouroullec.com, MNAM-CCI (diffusion RMN), (67,73 x 92,6 mm..).

Les « Algues » sont des modules individuels de 32 x 25.7 x 4 cm, en plastique injecté. Ces pièces au titre évocateur (car c’est bien d’algues à proprement parlé dont il s’agit) sont vendues par vingt-cinq et sont disponibles en sept coloris (blanc, noir, vert, rouge, vert-clair, rouge-clair, transparent). Conçues selon des formes organiques, rappelant ostensiblement la nature et ses courbes accidentelles mais harmonieuses, il convient de les associer les unes aux autres. En effet, chaque module peut s’accrocher à ses pairs grâce à des attaches situées à chaque extrémité de leurs branches. Ainsi, une algue n’est pas à concevoir comme une entité autonome, qui se suffit à elle-même. La réelle force de cette conception est l’accumulation de modules, qui permet nombre de combinaisons différentes.

BOUROULLEC R. et Er., Algues, 2004, polyamide injecté, chaque unité: 300 x 40 x 270 mm., © Georges Meguerditchian – Centre Pompidou, MNAM-CCI (diffusion RMN), (9,7 x 13,2 cm.).

Chaque pièce est identique à l’autre, fruit d’une production en série, copie parfaite. Elles peuvent être aisément assemblées à la main. Une attention particulière a été accordée à cette simplicité de montage. Chaque acheteur peut, de cette façon, associer les pièces au gré de ses envies sans difficulté particulière. Ainsi, les « Algues » peuvent être utilisées de différentes manières, sur de plus ou moins grandes surfaces (sachant que 25 modules recouvrent un mètre carré). S’organisant selon l’impulsion, l’envie de son utilisateur. L’accumulation d’algues peut changer leur apparence et l’appréhension que l’on a d’elles. En superposer plusieurs couches viendrait à créer un rideau épais, coupant la lumière, isolant totalement l’espace. Au contraire, n’en disposer qu’une seule épaisseur donnerait une toute autre impression. Le jeu de lumière et d’ombre filtrant à travers les algues, dans des formes souples se trouve totalement transformé, selon leur association. De rideau fin, simple agrément d’une pièce, elles peuvent prendre une dimension monumentale.

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BOUROULLEC R. et Er., Algues, 2004, polyamide injecté, chaque unité: 300 x 40 x 270 mm., © Ronan et Erwan Bouroullec – Bouroullec, (69,32 x 92,6 mm.).

En effet, les « Algues », modules minimalistes, peuvent prendre une envergure presque architecturale. L’accumulation de ces entités peut amener à transformer complètement l’habitat, le recouvrant dans un amas, dans une forêt organique. Lors de la conception du projet, les frères Bouroullec les avait imaginé recouvrir le haut de jardins, le toit d’immeubles. Les algues auraient alors servi de camouflage, offrant à la ville une ornementation plus naturelle. Ou bien comme un rideau épais voulant totalement couper un espace, comme un mur, une paroi infranchissable.

BOUROULLEC R. et Er., Algues, 2004, polyamide injecté, chaque unité: 300 x 40 x 270 mm., © Paul Tahon and R & E Bouroullec – Bouroullec.com, (92,6 x 54,23 mm.).

Les « Algues » sont un bel exemple d’installation modulaire, qui peut transformer un espace en de multiples combinaisons, et offrant de nouvelles solutions pour agrémenter l’habitat. Elles s’inscrivent totalement dans la ligne directrice du travail des frères Bouroullec et leur recherche sur la modification de l’espace; mais aussi sur la possibilité de créer de nombreuses oportunités avec une seule forme. Les combinaisons qu’elles offrent sont infinies et permettent de créer autant d’univers sensoriels différents. Car plus que personnaliser un espace, elles donnent l’opportunité d’expérimenter une ambiance poétique et personnelle.

Présentation et détail des objets: ‹http://www.bouroullec.com/›.

Bajolet Matthieu et Lapointe Thomas, « Erwan Bouroullec: ‘Nos objets doivent pouvoir se reconstituer dans un contexte », revue-entre.fr, En ligne, ‹http://www.revue-entre.fr/?q=content/erwan-bouroullec-nos-objets-doivent-pouvoir-se-reconfigurer-dans-un-contexte, consulté le 05/04/2014.

Gazsi Melina, « Les frères Bouroullec en apesanteur« , lemonde.fr, En ligne, ‹http://www.lemonde.fr/style/article/2013/05/14/les-freres-bouroullec-en-apesanteur_3202309_1575563.html, consulté le 05/04/2014.